Note : cet article a été complètement réécrit le 4/3/2017
Il ne faut pas confondre la « forme sonate » avec le genre de la « sonate ». La confusion est d’autant plus compréhensible que, bien souvent, le premier mouvement d’une sonate classique est de forme sonate. Après une longue évolution, la sonate classique offre une structure analogue à celle de la symphonie, mais elle comporte généralement trois mouvements (vif, lent, vif) alors que la symphonie en comporte plutôt quatre.
Pour aller vite, la forme sonate classique repose essentiellement sur deux principes, le bithématisme et un découpage en trois parties :
1. exposition de deux thèmes contrastés dans des tonalités différentes (exemple : thème A en majeur et thème B à la dominante ; ou bien A en mineur et B dans une tonalité majeure relative) ;
2. développement (variation) des deux thèmes précédents ;
3. réexposition des deux thèmes dans la tonalité principale et courte coda pour conclure.
Mais ce schéma, même s’il est globalement respecté, subira bien des évolutions au fil du temps. Selon le musicologue Carl de Nys, c’est Carl Philipp Emanuel Bach qui a dans les années 1730 « mis au point la "forme sonate", "inventée" par son frère aîné, Wilhelm Friedman » (Dictionnaire de la musique, 1986). Joseph Haydn écrivit, lorsqu’il eut la révélation des sonates de Carl Philipp Emmanuel : « Je ne quittai pas mon clavier avant de les avoir toutes jouées. Celui qui me connaît bien trouvera que j’ai de grandes obligations envers Emmanuel Bach, que j’ai saisi son style et que je l’ai étudié avec soin. » (A. Charon et F. Fayolle, Dictionnaire historique des musiciens, 1810, tome I, p. 319). La forme sonate se stabilise donc, et ce n’est pas un hasard, en même temps que les genres de la sonate, de la symphonie, du quatuor à cordes et autres formes instrumentales, dont elle constitue le premier mouvement. Discours complexe mais rationnel, elle est aussi typique du siècle des Lumières où, avec méthode, les philosophes exposent leurs idées, discutent et s’écoutent. Au début du XIXe siècle, elle sera précisément décrite par Anton Reicha dans son Traité de haute composition (1824).
L’inventivité des compositeurs a donc continuellement enrichi et fait évoluer la forme sonate. On verra plus bas, à travers l’analyse de quelques œuvres, avec quelle liberté les compositeurs l’ont utilisée.
Par exemple, l’exposition est souvent précédée d’une introduction lente ; le passage du thème A au thème B peut s’effectuer par une modulation brusque ou par l’intermédiaire d’un pont modulant ; chaque thème peut se prolonger par une amorce de développement, ou s’achever par une petite coda ; durant la période classique, l’exposition fait systématiquement l’objet d’une reprise à l’identique, usage qui se perdra au cours du XIXe siècle.
Le développement, où règne par définition la plus grande liberté, est un épisode instable, lieu de modulations et de variations mélodiques et rythmiques, construit en priorité sur le thème A. Cependant, il doit être orienté vers le ton de la tonique pour aboutir à la réexposition. Au fil du temps, le développement prendra de plus en plus d’ampleur. Par exemple, il dure à peine la moitié de l’exposition chez Wolfgang Mozart alors que, chez Ludwig van Beethoven, il a la même importance.
La réexposition reprend rarement l’exposition de façon textuelle : les thèmes, repris dans le ton initial, sont souvent enrichis de variations ou de modulations inattendues qui créent la surprise. Quant à la coda finale, au début réduite à quelques accords, elle deviendra finalement aussi importante que les autres parties.
Plus on avancera dans le XIXe siècle, plus le caractère bithématique de la forme sonate sera accusé, le contraste s’amplifiant entre les thèmes A et B. Mais A reste primordial : on le qualifie de masculin (il est rythmique et d’allure décidée) alors que B est dit féminin (de caractère plus mélodique).
Un bon exemple de forme sonate analysé sur Symphozik : analyse du 1er mouvement de la Symphonie n° 5 de Beethoven.
1er mouvement de la Symphonie n° 8 (1822) de Franz Schubert, à découvrir en écoute accompagnée de la structure
Dans le 1er mouvement du Concerto pour piano no 27 (1791) de Mozart, le plan de la forme sonate est aménagé pour mettre le piano au premier plan (visualisation)
Durant la période romantique, les élans passionnés des compositeurs se moulent difficilement dans une forme rigoureuse. Frédéric Chopin en offre un effet ample dans le premier mouvement de sa Sonate pour piano n° 2 dite Funèbre (1837 ; visualisation).
On retrouve la forme sonate au XXe siècle sous la plume d’Anton Webern. Dans la première pièce de ses Cinq mouvements op. 5 pour quatuor à cordes (1909), il a recours à la rigueur de cette forme classique sans doute pour compenser le caractère déroutant de son écriture dodécaphonique (visualisation).
Anonyme, le 02/04/2016 à 11:12
Toujours pas de dossier ????
azerty, le 23/03/2015 à 11:00
Dossier « forme sonate« tjrs en souffrance, dommage ! Pourquoi, en attendant, ne pas le remettre en ligne tel qu’il était ?
Symphozik, le 23/03/2015 à 20:10
Un ultimatum très menaçant a été adressé à l’auteur ! (mais c’est lui qui préfère ne pas afficher l’ancienne version donc Symphozik s’incline)
gui303, le 04/01/2014 à 17:32
Quand le dossier sera en ligne ?
Symphozik, le 05/01/2014 à 13:54
Karajan seul le sait…Le contributeur a l’origine de ce dossier est actuellement en congé nerf.
virepoulpe, le 30/08/2010 à 17:16
Bonjour
Je suis en désaccord (léger) sur votre analyse de la modulation de la mesure 57 lorsque vous écrivez que Mozart module par enharmonie en SI majeur. Certes, il module bien par enharmonie mais... en mi mineur.
Rappel de la technique utilisée : Mozart transforme l’accord de 7ème de dominante de FA majeur (do-mi-sol sib) en accord de sixte augmentée (do-mi-sol-la#). Mais cet accord n’est plus un accord de dominante mais un accord de prédominante qui aboutit sur la dominante.
En effet, une sixte augmentée se résout sur un un accord de dominante et non de tonique. Ainsi, l’accord de la mesure 58 est un accord de dominante de mi mineur (et non l’accord de tonique).
En outre, c’est plus logique, dans toute cette sonate Mozart reste dans des tonalités voisines de la mineur. Mi mineur est une tonalité voisine, tandis que SI majeur est éloignée...
Cordialement
virepoulpe, le 30/08/2010 à 17:36
Re-bonjour
Je suis navré, mais j’ai une seconde remarque portant cette fois sur la première partie de votre sujet.
En effet, il est inexact de dire que la forme sonate bithématique a été "inventée" par les fils de Jean-Sébastien Bach, et plus précisément, par Carl Philip Emmanuel Bach.
En effet, cette forme avait déjà été employée dès le début du XVIIIème siècle par l’Ecole de clavecin, (c.f. notamment Domenico Scarlatti dans plusieurs de ses sonates) ou encore le violoniste Felice Dall’Abaco (1657-1742) qui est l’un des premiers a introduire le second thème...
Par contre, il est reconnu qu’on doit bien à l’autorité de CPE Bach d’avoir imposé cette forme aux compositeurs qui lui succèderont, à commencer par les compositeurs classiques puis les autres...
Cordialement
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